Lady Arlette n’est plus vraiment une débutante avec déjà six albums et des premières parties remarquées chez Thomas Fersen ou Ariane Moffatt

Elle continue de façonner son parcours, tel un artisan, avec une gourmandise musicale et un vrai talent d’écriture.
Bonjour Lady Arlette, peux-tu te présenter ? Et d’ailleurs, pourquoi ce nom?

Arlette est mon troisième prénom et Lady,  car j’ai dépassé l’âge d’être une miss, même si je suis « née » en 2008. Au départ, c’est un amusement, une invention de personnage (ma première tenue est une robe de mariée improbable avec un chapeau rose). Puis je m’y suis attachée.

Comment es-tu venue  à la musique?

J’y suis arrivée assez tôt, vers 10 ans et le cadeau pour ma communion fut ma première guitare électrique offerte par mon parrain. J’allais espionner mon frère qui jouait lui sur une Fender MusicMaster et qui reprenait les Beatles. J’aimais beaucoup aussi passer dans le garage du voisin, écouter ses reprises d’AC/DC.

Quelles ont été tes premières compositions? Et tes premières prestations sur scène ?

On a très vite monté un groupe au collège (en fin de 5ème) et on a tout de suite composé des titres. C’était évident. Les reprises ne nous attiraient pas (ceux et celles qu’on admirait le faisant tellement bien …) On a fait très vite des concerts : fête du collège, premières fêtes de la musique.

Quelle a été la suite de ton projet musical ?

Jusqu’au lycée, on n’a pas arrêté de faire de la musique puis les études et les géographies diverses nous ont séparés. Pendant mes études de lettres à Lyon, on a repris la route de l’écriture (avec mes copains et copines de Khâgne) et à la fac ensuite, j’ai été prise dans un groupe de salon (littéralement) où on jouait à deux guitares, des titres inspirés par le groupe Suede.
C’est là que j’ai rencontré la musique pop et les guitares subtiles sans solo tonitruant.

A quel moment as-tu commencé à écrire et composer ?

Je crois que j’ai commencé à composer et écrire en même temps que j’ai empoigné ma première guitare. Puis le travail s’est affiné suivant les groupes et les artistes avec qui je travaillais. Les textes ont été importants à partir de Claire et ses radis (groupe de chansons rouennais dans lequel j’étais le «radis » qui jouait de la guitare).

C’est certainement cela qui m’a aidé à monter un projet plus personnel où j’assumais et proposais mes propres compositions et textes.

Quel est ton processus de composition ?

J’ai des carnets en pagaille, des tickets de parking dans l’auto, couverts de mots, idées, bouts de phrase … J’aime travailler le matin, très tôt. Je relis les notes et j’écris. C’est la plupart du temps assez long. Je n’ai pas une facilité – ou plutôt une rapidité – de composition.

Puis quand le texte est là – pas forcément terminé mais dans les grandes lignes, soit une musique apparaît soit, et c ‘est plus souvent le cas, un son, un titre écouté à la maison, ou dans la rue, un café, résonne et m’indique une voie.

Par exemple sur le titre «Autobiographie Pirate », la fin a été inspirée par un morceau de Dominique A (« L’horizon »), « Cannibale Blues » par une anthologie de titres de Robert Johnson et le phrasé de Gul, « Elvis m’attendra »,  c’est dit dans la chanson.

Quels sont les artistes qui t’inspirent ?

Des artistes dont j’aime la plume comme Dominique A que je viens de citer, Thiéfaine, Brigitte Fontaine, Arman Méliès, Bashung (et l’album «Fantaisie Militaire ») … des musiques dites world : Angélique Ionatos par exemple, du rock, le son de Rodolphe Burger, l’énergie de Melissa Etheridge, la musique plus ou moins hard, du blues, du rap Iam, Kendrick Lamar, Oxmo Puccino, Casey et des groupes comme Placebo, Radiohead, du jazz comme Mathias Eick. De l’électro comme Death In Vegas. Bref, tout me va.

Peux-tu nous parler de tes six premiers albums?

Ils sont assez différents car ils ont été réalisés différemment. J’aime bien changer d’ailleurs : le premier (« Je suis Madame ») est fait maison entre la Gare aux Musiques et le Trianon Transatlantique (salle qui avait soutenu et financé le 1er EP) Puis pour les suivants j’ai fait appel à des amis et des gens qui avaient aussi envie de travailler avec moi : Pierre-Alexis Quoniam et notre label « La Femme à Barbe » pour « Je suis Diva » (enregistrement  et travail en groupe), Ludwig Brosch pour « Les beaux vertiges », « Les belles échappées » et « 10 » (le best of, avec des titres revus, corrigés et joués par Ludwig, mixés par David Fontaine et des invité.e.s 🙂 Pauline Denize, Thierry Dutru, Gaétan Le Calvez, William Pina, Mirjam Tautz, Delphine Franck, Dominique Bonafini, guL, Benoît Hauchecorne, Claire Jau, Lili Vital, Qu’en pense Gertrude ? (Ariane Delamotte), Arnaud Herrero (ArnoH), Stéphane Coubray. Ces 6 premiers albums ont été portés aussi par l’équipe de mon association « Too old to die » avec notamment Alexandra Belin, Michèle Imbert, Florent Barthélémy et tou.te.s les fans invisibles mais essentiel.le.s

Quels sont tes plus beaux moments sur scène ?

Les dates au Trianon sont à chaque fois très belles et la dernière avec mes « invités » étaient une réussite je trouve. En tout cas c’était une belle fête. Les Terrasses du jeudi (2010 et 2019), la première partie d’Ariane Moffatt ou celle de Thomas Fersen au 106. Et puis j’aime aussi les petits lieux, Le Rêve de l’escalier par exemple, Le Saxo, Le Café de l’époque. On a fait un concert à la prison d’Evreux qui était très émouvant.

 Autobiographie pirate  vient de sortir, peux-tu nous dire s’il est dans le même registre ?

Ca reste du Lady Arlette,  mais avec un retour à quelque chose de moins luxuriant, arrangé avec guitares et quelques instruments à vents  qui donnent de l’air. Gul, à la réalisation, nous a invités à suivre cette voie, plus rock aussi. François Casays (Accès Digital) étaient aux baguettes et a réussi à mettre en valeur ce qu’on voulait.

Je l’aime beaucoup car les textes sont plus autobiographiques et le travail a été celui d’une équipe – même si on a eu le temps de n’enregistrer que six titres. J’y ai mis beaucoup d’énergie, de temps, j’ai même réalisé la pochette.

Comment as-tu vécu les périodes de confinement ? 

Assez bien, je l’avoue. J’ai quand même travaillé, j’ai écrit, j’ai répété aussi. Même si le temps était un peu suspendu, je me suis posée. J’en ai profité pour rencontrer même virtuellement d’autres artistes, comme Sta Rlette qui m’a proposé de faire des reprises ou Claire Vezina, de l’autre côté de l’Atlantique, pour le titre  Elvis m’attendra 

Comment comptes-tu faire vivre ton nouvel album ?

Par des concerts bien sûr, des radios … Je propose deux formules : acoustiques ou électriques et j’arrive à varier les endroits où je joue

Quel est ton rapport avec la région rouennaise ?

C’est ma région d’adoption . Je viens de Franche Comté, j’ai fait mes études à Lyon et je suis  montée  à Rouen car à l’époque (XXe siècle) c’était une académie déficitaire, certain.e.s ami.e.s étaient déjà là. J’y suis toujours. C’est donc un « biotope » qui me va bien.

Quels sont les artistes qui t’ont accompagnée sur cet album ?

Les six titres ont été enregistrés à l’automne 2020 chez François Casays Studio Accès Digital, Rouen. Gul (guLdeboA) s’est chargé de la réalisation. Je me suis occupée du chant, des guitares, des textes et des compos (musique avec Jérôme Sautier sur  Elvis m’attendra ) ; Clémence Denoyer : basse, choeurs et un clavier sur  Le Passage ; Paolo Consiglio : guitares, choeurs ; Valentin Hébert : batterie & percussions ; William Pina : clarinettes ; Yannaël Ortega : trompette (un génie tout jeune de l’instrument et il vient du Havre:)) ; Fabien Truy : didgeridoo ; Stéphane Coubray : piano sur Elvis m’attendra  d’après l’arrangement de Claire Vezina ; Olivier Hue : guitare slide

Tu as eu recours à un financement participatif, peux-tu nous en parler ? 

J’ai eu recours à trois reprises à ce système de financement (sur Je suis diva10  et cet album). Nous sommes une petite structure (l’association  Too Old To die  dont je parlais plus haut), plus proche de l’épicerie que de la grande distribution. Passer par ce système de financement correspond à notre défense de la solidarité, nous permet de souffler un peu, de compter sur des fans fidèles (et je les en remercie) et de réaliser nos projets – qui restent modestes mais accessibles et surtout libérés de toutes contraintes mainstream de marketing. On en profite aussi pour faire des  cadeaux – j’aime bien personnaliser les  envois – ou des propositions uniques. Par exemple, on a édité pour l’occasion un livre Une Valse avec Elvis  avec des photos d’Anne-Lise Boudet (https://www.calameo.com/books/0021424604e7e9e92d1cb) sur le texte  Elvis m’attendra . On y a ajouté un CD avec différentes versions de cette chanson (acoustique, confinée et en rock par lesFuckin Babel Love). J’ai aussi proposé des autographes sur des brosses à dents (en bois) et des tee-shirts

Peux-tu citer trois artistes de la région que tu apprécies ?

Je ne vais pas citer de musiciens ou de musiciennes car il y en a beaucoup que j’apprécie et c’est difficile de n’en citer que trois … Tous ceux et toutes celles avec qui j’ai travaillé méritent plus qu’un détour ! Je pense aussi à votre site, à la Sonothèque et à la Murmure qui mettent en valeur les artistes locaux et permettent de découvrir les talents de nos régions (j’ai l’impression de parler comme un hypermarché). Ce sont des relais précieux pour les artistes, qu’ils soient au début de leur carrière, en devenir ou installés.

Je me rabats donc sur les arts visuels et le théâtre
La troupe de l’Escouade (Christine Leroy et Emmanuel Billy) http://troupedelescouade.fr/Troupe_de_lEscouade/Bienvenue.html et leur travail avec l’ESAT de la Vallée du Cailly. C’est une de mes plus fortes rencontres artistiques et humaines (nous avons monté un spectacle avec les textes de Babouillec – une artiste autiste fulgurante !)
L’artiste Inkoj (Nicolas Soulabail) http://inkoj.com/ – il fait du street art notamment mais pas que.. et a posé sa poésie éphémère sur les trottoirs du quartier Saint Marc à Rouen. J’aime cette modestie d’un art qui se fond avec la ville et les gens.

L’autrice-réalisatrice-photographe Lydie Turco – http://lydieturco.com/ Je l’apprécie pour son engagement, son humanité rare et un œil – voire deux – très empathique. Il y a en ce moment une expo bouleversante au CHU de Rouen Etre et paraître https://www.chu-rouen.fr/events/rencontre-avec-lartiste-lydie-turco-exposition-paraitre-et-etre/

Entretien réalisé par Grégory Constantin Juin 2021

Contribution à la rédaction Fabrice Autret

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