Flûtiste formée en même temps au jazz et au classique, Ludivine s’est orientée au fil de ses rencontres vers le Hip Hop. L’artiste a accompagné entre autre Wax Tailor sur de nombreuses scènes à travers le monde pour ensuite travailler sur des projets plus personnels. Le Boulevard des Artistes à souhaité vous présenter le parcours et les nombreux projets de cette artiste talentueuse native de Bayeux qui sortira son nouvel album le 14 septembre Outlaws Remix.

Bonjour Ludivine, pour commencer cet entretien peux-tu nous dire quels ont été tes premiers contacts avec l’apprentissage de la musique ?

Par la danse. Ma mère m’a fait essayer la danse classique à 4 ans, j’ai adoré ça , j’ai suivi 2 à 3 cours par semaine jusqu’à mes 13 ans. En parallèle, à 6 ans , j’ai voulu essayer la musique.
Très rapidement cette dernière a fini par prendre le dessus.
Pourquoi avoir choisi la flûte traversière ?

Je ne vais pas vous raconter de grande histoire, de mon souvenir ça a été un peu du hasard. Lorsque ma maman m’a demandé quel instrument je voulais jouer, j’ai répondu le violon. Nous sommes allées à l’école de musique de Bayeux pour m’inscrire mais je n’ai pas compris et pas apprécié que l’on m’oblige à faire du solfège pendant un an avant que je puisse toucher l’instrument : je voulais jouer!
Pas rester assise à une table à gratter du papier et ingurgiter de la théorie à propos de quelque chose que je ne connaissais pas encore.
Nous sommes donc ensuite allées voir un professeur particulier, un grand musicien et pédagogue, qui lui, enseignait la flûte traversière et le saxophone « Jean-François Millet ». En attendant que les élèves aient la morphologie adéquate pour jouer d’un des deux instruments, ils mettaient les enfants directement dans la pratique en leur apprenant à jouer de la flûte à bec en groupe, dès l’âge de 6/7ans j’ai eu une expérience de « pratique de musique en groupe » avec une trentaine d’autres enfants.
J’ai ensuite, à 9 ans, choisi la flûte traversière et elle ne m’a jamais lâchée depuis.

Quel a été ton parcours d’enseignement pour devenir professionnel ?
J’ai pris des cours de classique et jazz avec Jean-François Millet du côté de Bayeux, je suis ensuite rentrée au conservatoire de Caen en cursus classique et cursus jazz. J’ai ensuite poursuivi mes études, toujours dans les 2 cursus, au Conservatoire de Cergy-Pontoise en Région parisienne.
Cela m’a permis de commencer à aller écouter un maximum de concerts, à aller dans les jams sessions parisiennes, rencontrer des musiciens mais aussi mes mentors de l’époque (Magic Malik, Hervé Meschinet, Michel Edelin..) . Je suis ensuite partie 5 ans en tournées internationales avec Wax Tailor, je suis donc devenue intermittente du spectacle à 23 ans.
Après cette expérience très riche, j’ai repris mes études en entrant au Cefedem d’Ile de France (Rueil-Malmaison) et j’en suis en 2012, la première flûtiste à obtenir mon Diplôme D’État de professeur de jazz.
Je continue encore de former dès que j’en ai l’occasion, par exemple j’ai fait d’un stage à New York, en novembre dernier, sur « la direction artistique et arrangements des musiques afro-américaines « 
Quelles étaient tes références à l’époque ?

Flutistiques : Roland Kirk, Eric Dolphy, Yssef Lattef, Magic Malik, Hervé Meschinet…

Sinon j’écoutais : Julien Lourau Gambit, The Herbaliser, Cinematic Orchestra, Erik Truffaz, Laurent de Wilde….

Quelle a été ta première formation ?

H-NOD : mon premier groupe Jazz-electro (Bass/batt/guit/Scratch/Sax/flûte), où l’on jouait des reprises des groupes cités ci-dessus

Live @ festival Jazz sous les Pommiers – Magic Mirror 2006

A quel moment as-tu décidé que tu voulais vivre de ton art ?  
A environ 15 ans.
Quel a été le tournant de ton début de carrière ?
2007 quand je suis partie en tournée avec wax Tailor, je suis devenue intermittente donc totalement indépendante, et j’ai pu voir un peu plus le monde en voyageant énormément.  
Quels ont été tes meilleurs souvenirs de ta collaboration avec Wax Tailor ?

La première partie de Jamiroquai aux Arènes de Nîmes, le fameux festival anglais « Glastunbury », plusieurs Olympia mais surtout le premier qui est d’ailleurs sorti en DVD blue-ray – CD « Live à l’Olympia 2010″…

Tu as ensuite créé ton projet personnel Antiloops, quelles ont été tes motivations  ?
J’avais emmagasiné beaucoup de musiques et d’expériences, musicales mais aussi humaines. Tous ces voyages, l’immersion dans le hip-hop par rapport à mes premières amours qui venaient du jazz, les sons synthétiques, les effets, les samplers. Et l’improvisation là dedans? Toutes ces questions bouillonnaient en moi, il fallait que j’en sorte quelque chose. J’ai créé mon laboratoire, le groupe Antiloops.
Peux tu nous présenter ta formation ?
ANTILOOPS est une sorte de collectif, mais le noyau dur est : Basse, batterie, claviers, flûtes. J’y ajoute ensuite en fonction des morceaux : Dj, scratch, rappeur, chanteuse ou encore Vj pour apporter du mapping sur la musique. (Vj, vidéo jockey comme Dj, disc Jockey ndlr)
Je tourne souvent avec 2 formules : la version ANTILOOPS band et la version ANTILOOPS Dj & Vj Set .
Quelles sont les sonorités et influences d’Electrochoc, votre premier album ?
Hip-hop, Funk, électro jazz. J’y collabore entre autres avec Dj Greem (Hocus Pocus, C2C..) , ou encore avec les rappeurs d’A.S.M.
J’ai ensuite fait remixer l’album Electroshock Remixed qui est sorti 6 mois après l’original en septembre 2015
Tu pratiques le Beat box, comment as-tu découvert cette technique ?  
Par un flûtiste américain qui s’appelle Greg Patillo. Il a adapté la technique de la beatbox sur la flûte, il a mis ça en avant en 2005 avec sa vidéo « L’inspecteur Gadget » : 3 millions de vues en 3 jours. Je faisais partie de ces gens qui hallucinaient devant leur écran.
Étant à cette période en tournée dans un milieu plutôt hip-hop, trip-hop, le moment était plus que propice pour m’y essayer, c’est ce que j’ai fait.
J’ai ensuite adapté ça à une configuration plus jazz en débutant Antiloops en version trio basse, clavier et flûte beatbox avec des samplers et autres FX. J’ai ensuite ajouté un batteur, un Dj et nous avons sorti notre premier EP en fin 2013 « Yep » qui annonçait le premier album qui arriva en 2015 « Electroshock ».
Ton deuxième album, Lucid Dream est sorti 2 ans après, plus orienté Electro Soul, quelles sont les collaborations que tu as faites sur cet album ?

Ma collaboration avec des chanteuses, chose que je n’avais pas exploré du tout dans le premier album : j’ai invité la chanteuse blues funk Nina Attal et la magnifique voix de Milena Fattah. Il y a eu un changement au niveau de la batterie aussi sur ce deuxième album : Maxime Zampieri apporte clairement un son plus électro, ceci associé au fait que j’ai utilisé trois plus les machines et sons synthétiques sur ce deuxième album.
Un entre-deux, entre humain et machine : entre rêve et réalité…

Quels sont tes souvenirs de scène les plus marquants ?
Jazz sous les Pommiers, Jazz à Vienne, jouer avant Jeff Mills au Carreau du temple à Paris, Le café de la danse, il y en a tellement.
Par la suite, tu as sorti ton album perso Outlaws, un tribute à Hubert Laws, pourquoi ce choix ?

Avant tout, un amour pour cette musique, les années 70’s, ce flûtiste « Hubert laws » que j’ai tellement écouté et à qui j’ai voulu faire un tribute en me focalisant sur cette décennie. Hubert Laws est un flûtiste qui s’est illustré avec beaucoup de monde à cette époque (Herbie Hancock, Chick Corea…) et les albums à son nom sont passés un peu plus inaperçus : j’ai voulu faire connaître un peu plus la musique de ce fabuleux musicien et le son du label qui l’accompagnait « CTI ».

J’avais aussi envie de monter un autre projet à côté d’Antiloops, un projet de reprises, avec d’autres musiciens, j’avais envie de me nourrir de la musique de quelqu’un d’autre pour ensuite revenir avec un souffle frais sur mes compositions. Antiloops existe toujours, nous sommes d’ailleurs en train de préparer le prochain album qui ne devrait pas tarder à arriver…

Un petit mot sur la photo de l’album réalisée au Havre ?
Elle a été imaginée, créée par un grand photographe : Marc Ribes. Marc a imaginé un univers, une histoire, par rapport à la musique de ce disque. C’est lui qui a trouvé cette soucoupe, exposée aux jardins suspendus du Havre, il a contacté la mairie et l’artiste finlandais pour demander l’autorisation d’aller y faire une shooting et c’était parti : l’histoire visuelle associée à la musique d’ Outlaws était née.
Le troisième album d’Antiloops est en production, quelle sera l’évolution sonore sur cet album ?
Très électro, on va encore plus loin dans notre laboratoire : on fouille on s’amuse, on trouve, on est surpris, on continue de fouiller.
Parlons de la période du confinement, qu’est-ce que cela a provoqué chez toi ?

Le « Yoyo », dans le sens où j’ai ressenti un moment propice à la création et en même temps, parfois, e néant, l’énorme point d’interrogation.
J’ai fait plein de choses que je n’avais pas le temps de faire en temps normal ( j’ai repris le piano, des compos laissées en chantiers, des livres, des recherches)
Ce qui était positif était le fait de pouvoir prendre le temps de faire les choses.
Mais parfois des gros moments de doute, de quelque chose de l’ordre de la démotivation, le dégoût de voir ce qu’il se passe à l’extérieur et une sensation que je suis une privilégiée à pouvoir rester chez moi, à créer et continuer de poursuivre mon activité d’artiste : suis-je vraiment utile pour les autres ou suis-je totalement égoïste?
Voilà les questionnements qui m’ont traversés. Des moments de doutes, je pense comme beaucoup de gens.

Mais j’ai été productive pendant ce confinement, j’ai avancé sur plusieurs projets qui étaient en cours : le nouvel album d’Antiloops, la création d’un nouveau projet acoustique en quintet (contrebasse, piano, batterie, flûte , trombone)..J’ai aussi fait des projets que le confinement m’a permis de faire : « Outlaws Remixed » qui sortira le 14 septembre prochain : j’ai bossé sur mon album « OUTLAWS » mais en version remixée avec la collaborations de plusieurs producteurs, beatmakers, rappeurs…
Save the date : 14/09/20 OUTLAWS REMIXED sortira chez Heavenly Sweetness.

Où pourrons nous te voir sur scène dans les prochains mois ?

La date à retenir pour l’instant est le 5 octobre au Pan Piper à Paris , Release Party d’Outlaws qui devait avoir lieu le 6 avril et qui est reporté au 5 octobre.

Pas mal de choses ont été annulées, reportées à l’hiver 2020/2021, à suivre…

Tu proposes en parallèle de ton activité, des masters class, qu’enseignes-tu et où proposes-tu ces cours ?
J’enseigne depuis que j’ai 18 ans, j’ai mon Diplôme d’Etat, je donne des cours autant en conservatoire, qu’en écoles associatives. Autant
à Paris, que des cours particuliers chez moi , on m’appelle souvent pour des remplacements et je donne de manière régulière depuis 5 ans des master-class dans la France entière. Souvent le projet pédagogique est accompagné d’un concert avec Antiloops avec les élèves en première partie ou avec nous sur scène parfois.
En ce moment , je propose 3 projets pédagogiques
1 – « LE RYTHME ET L’IMPROVISATION : L’APPRENTISSAGE DE LA BEATBOX SUR LA FLÛTE » :
2 – « LE TRAVAIL DE GROUPE : LE SON, LE GROOVE, L’IMPROVISATION » : s’adresse à tous les instrumentistes, chanteur/ses
3 – « LA FLÛTE ÉLECTRIQUE » : s’adresse aux flûtistes dans un premier temps, aux soufflants, mais peut s’élargir et s’adapter à tous les instrumentistes, chanteuses/rs aussi. On y aborde notamment le sampling et la Musique Assistée par Ordinateur.
Pour terminer cet interview, peux-tu nous présenter trois artistes de la région que tu apprécies?
Elodie Saint : chanteuse (Tiken Jah..) et autres talents : https://www.facebook.com/loxone.solo
Pierre Millet : trompettiste, compositeur : https://www.facebook.com/pierre.millet.1428
Emilie Horcholles : Comédienne, chanteuse, performeuse… : https://www.facebook.com/emilie.horcholle.5
et un quatrième Vincent Aubert : Tromboniste (Alpha Blondy, Electro Deluxe et autres…) Mr Funky par excellence  : https://www.facebook.com/vinceaubert

Entretien réalisé par Grégory Constantin Juillet 2020

Contribution à la rédaction Fabrice Autret

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