Metteuse en scène et comédienne, Laëtitia Botella est également fondatrice de la Cie Les Nuits vertes et l’une des trois membres de la Cie d’improvisation des Improbables. Nous avons voulu en savoir plus sur l’artiste qui pendant toute la période du confinement, nous a lu avec l’aide de ses amis compositeurs 54 contes pour enfants. Une belle initiative que nous voulions mettre en avant sur le BDA

Bonjour Laëtitia, pour démarrer cet entretien peux-tu dire quels ont été tes premiers contacts avec le théâtre?

En primaire, j’ai découvert le théâtre avec mon professeur, j’étais en CM2. Et depuis ce moment-là, je peux dire que ça s’est inscrit dans ma vie.
Quel a été ton premier rôle ?

Martirio dans « La maison de Bernarda Alba » de Federico Garcia Lorca, une pièce sublime, un auteur que j’admire terriblement et un rôle d’une profondeur incroyable.

Quels étaient tes modèles ou tes références à l’époque ?

Mais il y en a mille au moins !! haha !

J’étais fascinée par beaucoup de metteur.e.s en scène qui travaillaient avec des troupes de comédien.ne.s, comme Piotr Fomenko, Ariane Mnouchkine, Pippo Delbono. Chacun de leurs spectacles c’était comme retrouver une famille pour moi.

From the ITI website – http://www.iti-worldwide.org

A quel moment as-tu décidé que le théâtre serait ton métier ?
A la première émotion, dès le premier instant de découverte. J’avais 10 ans et ça a été clair et net tout de suite, j’ai pris toutes mes décisions en fonction de ça. Ma vie s’est articulée autour du théâtre.
Quelle a été ensuite ta formation théâtrale ?

J’ai commencé par prendre des cours dans un atelier « Le théâtre du corps » (j’adorais ce nom !), ensuite j’ai intégré l’option théâtre du lycée Porte Océane (qui a été une des plus belle formation de ma vie), ensuite je suis partie à Paris où j’ai suivi plusieurs formations en simultanées, en Lettres Modernes à la Sorbonne, et dans des conservatoires d’arrondissements de Paris (XVème, Xème et Centre). Et enfin j’ai été prise au Centre Dramatique Régional de Rouen (à l’époque !) dans la première promo du « GEIQ Théâtre »

Tu as très vite fait de la mise en scène, quelle a été ta première expérience ?
Ma première véritable mise en scène c’est « Le Chant du tournesol », un texte d’Irina Dalle. Cela faisait plusieurs années que je me sentais attirée par la mise en scène, mais j’avais besoin de me former d’abord en tant que comédienne, pour comprendre comment tout fonctionnait au plateau, pour avoir mes propres repères. Cette première mise en scène a été vraiment magique parce que j’y ai travaillé avec des gens que j’aime profondément et c’est sur cette création que j’ai vraiment trouvé mon binôme artistique avec Jean-François Lelong (créateur lumière) avec qui j’ai partagé la quasi-totalité de mes créations.
Quelle est ta technique d’apprentissage des textes ?  

Alors moi j’ai une mémoire photographique, donc pour retenir une texte je fais toujours beaucoup de symboles, de traits de couleurs qui n’ont aucun sens pour les autres mais qui sont précieux pour moi. Tous ces petits codes sont comme une partition de musique. La deuxième étape c’est de faire une activité physique en même temps que je répète mon texte, la dissociation c’est le meilleur moyen de s’entrainer.  

Photo Florent Pellen
Peu de temps après tes études, tu as fondé la Cie les nuits vertes, peux-tu nous en parler et nous expliquer pourquoi avoir choisi ce nom?

Oui j’ai fondé la compagnie avec mes ami.e.s de promo du lycée, on était très proches et on avait déjà joué trois spectacles ensemble, on avait envie de continuer à travailler ensemble malgré les différents choix d’études de chacun. Le choix du nom c’est grâce à mon prof de stylistique à la Sorbonne (que j’adorais), un matin à 8h il nous a lu « Le Bateau ivre » d’Arthur Rimbaud. C’était un moment très beau et je me souviens avoir tellement rêvé sur cette image quand il a prononcé les mots « Les nuits vertes …» je me suis dis « Il faut que la compagnie s’appelle comme ça ! ». Je trouve que ça ouvre tout un monde entre étrangeté et expressionnisme.

Combien de comédiens et techniciens ont travaillé au sein de cette compagnie ?
Beaucoup. Et c’est ma plus grande joie. Tous les gens qui ont travaillé au sein de cette compagnie sont des gens que j’aime de tout mon cœur, technicien.ne.s et comédien.ne.s tou.te.s sont des artistes incroyables qui m’ont appris beaucoup ! Je ne peux pas comptabilisé mais c’est certain qu’on a passé la cinquantaine de personnes !
En dehors de ta compagnie dans quelles pièces as-tu joué ?

Les dernières disons…

Dans Le Chant du tournesol avec ma compagnie ; dans  Ouasmok ? et  Lys Martagon avec la compagnie Akté ; Dans Le Village en flammes puis Les larmes amères de Petra Von Kant et enfin dans Légendes de la forêt viennoise avec la compagnie du Chat Foin Yann Dacosta.

Quelle est la pièce ou le rôle que tu as joué dont tu es la plus fière ?
Je ne sais pas…J’ai aimé chaque rôle. Je vais me laisser le temps d’en jouer d’autres avant la fierté haha !
Peux-tu nous expliquer comment tu es arrivée dans la troupe des Improbables ?
Quand je suis revenue au Havre il y a plusieurs années maintenant, j’ai un ami qui m’a dit « Viens ce soir on va voir Les Improbables, tu vas voir c’est génial ! »… et ben c’était tellement génial que j’avais plus envie de m’en aller ! J’avais envie de monter sur le plateau et de jouer avec eux ! J’ai envoyé un email à Ismaël Habia dès le lendemain je pense, pour  savoir s’ils faisaient des stages ou s’ils invitaient des comédien.ne.s à jouer avec eux. On a pris un café… j’ai fait un stage… et on ne s’est plus quitté !
La technique de travail du théâtre et celle de l’improvisation doivent être bien différentes, peux-tu nous en parler ?

Oui c’est très différents parce qu’en improvisation, il faut produire son propre texte et composer des histoires à plusieurs en live. Le travail de mise en scène part toujours d’improvisation bien sûr, mais la discipline est vraiment plus vertigineuse, on a pas de filet, si ça marche ça peut être extraordinaire et si ça foire et ben… ça foire ! haha ! C’est un endroit de disponibilité du comédien que je trouve fabuleux.

As-tu un souvenir de scènes avec les Improbables en particulier ?
J’en ai beaucoup ! Vraiment beaucoup ! Tous me mettent un sourire au coin des lèvres quand j’y pense en tout cas ! Mais il n’y a pas de plus beau moment que celui où on l’on sent que chaque comédien.ne sur scène est connecté absolument à l’autre et que les limites de l’imaginaire n’existent plus et que le plaisir est tout autant dans le fait d’inventer que dans le fait de le faire ensemble.
Pendant le confinement tu as proposé tous les matins une lecture de contes pour enfants, comment t’es venue cette idée ?
Je me suis dit qu’il fallait proposer aux parents des outils autres que les dessins animés et les tablettes pour avoir un petit moment de calme dans la maison. Je sais que mon fils de 4 ans peut passer au moins une demi-heure entière à écouter des histoires… ça l’apaise vraiment. Et je travaille depuis des années autour de la lecture à voix haute, je connais vraiment le pouvoir magique que ça peut avoir. Donc c’était assez évident pour moi qu’il fallait que je propose cette forme via les réseaux sociaux, qui touchent un public très larges et donc beaucoup de familles.
Et d’où te vient l’idée de faire participer plusieurs compositeurs pour t’accompagner sur ce projet ?
La musique est un moyen idéal d’enclencher la mécanique « imaginaire ». C’est elle qui va guider l’enfant vers l’histoire, puisqu’il n’y a pas d’image à regarder. Elle va teinter l’histoire d’une couleur, d’une atmosphère. C’est vraiment très important pour moi. Je conçois beaucoup de concert-littéraire, c’est une forme que j’aime beaucoup.
Y aura t-il une suite à ce projet ?

Je l’espère… en tout cas je vais retrouver le public en chair et en os cet été avec LE CALI (café littéraire itinérant), un chapiteau ouvert qui va se déplacer dans différents quartiers du Havre et avec lequel nous allons proposer des lectures pour les familles ! Toutes les infos seront bientôt sur le facebook de la compagnie (@Les Nuits Vertes).

Quels sont tes futurs projets ?

Je travaille actuellement à ma prochaine mise en scène, dans laquelle je joue également qui s’appelle Breaking the news, et que l’on créé en co-production avec le Volcan Scène Nationale en novembre prochain (au Théâtre des Bains Douches), rendez-vous la semaine du 2 novembre !

Pour terminer, peux-tu nous présenter trois artistes de la région Havraise que tu apprécies ?

La première on ne la présente plus… c’est Denize , une chanteuse et compositrice havraise, et accessoirement mon amie. Je la trouve brillante, son travail est toujours comme sorti d’un écrin très précieux. J’ai la chance de pouvoir travailler souvent avec elle et j’en suis heureuse et fière. Je vous invite à aller écouter son EP « Aube » et si je ne dis pas de bêtise un nouveau arrive bientôt ;

Ensuite je vais vous parler d’une autrice récemment installée au Havre et qui vaut vraiment le détour, Clémence Weill écrit, met en scène et est aussi comédienne. Je suis ravie de me plonger dans ses textes que je découvre avec un réel plaisir. Elle écrit d’une façon unique et toujours surprenante, vraiment allez découvrir ! (Pour n’en citer que deux :  « Pierre. Ciseaux. Papier » ; « Plus ou moins l’infini »)

Et un dernier artiste que j’aime fort, Guillaume Zolnierowski, petit génie de la musique, il est la fusion parfaite entre pop et hip-hop. Ses compos sont parfaites ! Il a fait partie du groupe Aloha Orchestra que beaucoup de havrais.es connaissent. Mais son travail de compositeur en solo vaut le détour ! J’ai la chance de pouvoir travailler avec lui sur mon prochain spectacle et j’en suis trop heureuse ! 

Entretien réalisé par Grégory Constantin Juin 2020

Contribution à la rédaction Fabrice Autret

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