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 Bonjour Arnaud, pour démarrer cet entretien, pourriez-vous vous présenter ?

Bonjour, je suis comédien et metteur en scène.

         J’ai une orientation très technologique et j’aime fabriquer des dispositifs scéniques qui prennent forme dans diverses scénographies pour le théâtre mais aussi pour des installations.

Quels ont été vos premiers contacts avec le théâtre? 

J’ai découvert le théâtre dans l'atelier du lycée technique Jules Siegfried au Havre où j'étais élève.

Quelle a été votre formation théâtrale ?

Dès l’ouverture du Théâtre des Bains Douches au Havre en 1989, j’ai suivi pendant quatre ans tous les cours de théâtre, les cours de mise en scène, les stages, que je pouvais intégrer. Je suis ensuite devenu assez rapidement professionnel en tant que comédien et aussi dans la technique et j'ai continué à apprendre mon métier en l'exerçant.

Comment est née la Cie Akté ?

Anne-Sophie Pauchet et moi étions depuis sept ans dans une compagnie semi-professionnelle, le Théâtre D, avec qui nous avions construit un théâtre à partir d’une salle de sport dans le quartier de Sanvic. Ce théâtre s’appelait « l’Espace Akté ». Cette compagnie ayant cessé ses activités en 2000, nous avons naturellement repris la direction de ce lieu dans la foulée et créé la Compagnie Akté avec d'autres artistes et techniciens havrais. Notre première création Cris d'amour a vu le jour dans ce petit théâtre de Sanvic en 2001.

Comment la Cie a évolué au fil des années ?

L'activité de la compagnie a pris de l'importance progressivement. Aujourd'hui nous avons des salariés permanents à l'administration, la médiation et la technique en plus de tous les artistes et techniciens intermittents du spectacle qui travaillent sur les différentes créations (cela représente plus d'une trentaine de personnes chaque année). Nous avons produit une quinzaine de spectacles et nous tournons maintenant partout en France. Ces dernières années, avant la crise sanitaire, nous jouions entre soixante et quatre vingt dates par an. Les actions culturelles que nous menons sur toute la région se sont progressivement étendues également et représentent une part importante de notre activité ainsi que l'école de théâtre de la compagnie où nous accueillons une centaine d'élèves enfants, ados et adultes. Depuis 2014 nous avons quitté Sanvic et nous sommes installés au Fort de Tourneville.

Proposez-vous une nouvelle création chaque année ?

Ce n'est pas une règle mais comme Anne-Sophie et moi-même sommes tous les deux metteurs en scène, nous créons alternativement chacun à notre rythme. Il est donc très rare qu'il y ait une année sans création mais cela peut arriver. 

Quels ont été les plus beaux moments sur scène de la compagnie ?

En vingt ans il y en eu beaucoup évidemment. En règle générale, les premières des spectacles sont toujours des moments forts. Sinon il y a eu cette représentation de George Dandin en extérieur à l'abbaye de Graville sous des trombes d'eau. Le public ne voulait pas partir, nous sommes rentrés tous trempés dans l'abbaye, les gens assis autour de nous, nous avons fini le spectacle sans décor, rien d'autre que le public le texte et nous. C'était un très beau moment de communion. Je pense aussi à la centième de Borges Vs Goya à Paris, ou la tournée de ce spectacle en Roumanie où nous avons dû faire rentrer la voiture qui servait de décor dans le spectacle par le grand escalier du théâtre National.

Akté c'est aussi une école de théâtre, comment peut-on s'inscrire à vos cours ?

Tous les renseignements sont sur notre site www.akte.fr et on peut également contacter Marine à la compagnie au 02 35 44 54 37 

Vous jouez du 28 au 3 mars au Théâtre des Bains Douches votre dernière création ATTENTION une pièce coécrite avec Chloé Giraud, pouvez-vous nous parler un peu de la pièce ?

Cette pièce est une première pour la compagnie au sens où c’est nous qui l’avons écrite.

Elle aborde des thématiques chères à Bernard Noël comme la castration mentale et la privation de sens produits par tous les mécanismes d’occupation de l'œil. La pensée de Bernard Noël est le fil rouge d’ATTENTION

L’histoire de cette pièce est celle d’ André Toujours, un scientifique qui décide de réunir dans un théâtre de Martigues un public soigneusement sélectionné et de lui proposer une opération du cerveau pour libérer à jamais ces spectateurs et spectatrices de l’emprise des flux audiovisuels.

Comment est née cette pièce ?

J’avais envie de travailler un seul en scène. Mon attention s’est arrêtée sur le  Monologue du Nous de Bernard Noël puis sur la globalité de son œuvre. Après un stage de théâtre avec Lionel Gonzalez et Jeanne Candel, j’ai découvert une nouvelle démarche de travail qui m'a donné envie d’écrire et de jouer une pièce en improvisation. Cette pièce aujourd’hui s’appelle ATTENTION.

Combien de temps avez-vous eu besoin pour créer la mise en scène ?

C'est une pièce qui est corrélée à un processus de travail assez long car peu commun, nous travaillons avec Chloé Giraud, à partir d'improvisations autour d'un sujet, en l'occurrence celui des flux audiovisuels.

Nous prenons le parti de créer l'écriture et la fiction du spectacle à partir de ces improvisations. Aucun texte n'est écrit, nous créons des rendez-vous de pensée, qui jalonnent mon parcours mais je reste libre de choisir les mots et expressions qui me semblent les plus parlants au moment M du jeu.
Pour vous donner une image c'est comme si nous construisions une architecture de maison, je connais la charpente, je connais toutes les pièces, je connais les circulations entre toutes ces pièces mais je reste libre d'ouvrir les portes dans l'ordre que je veux.
Ce processus d'écriture a duré trois ans et les premières dates de la création ont été par deux fois reportées à cause de la crise sanitaire et les fermetures des théâtres.

Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?

Comme expliqué plus tôt, ce processus empirique de création et d'invention, nous a piégé à plusieurs reprises notamment au niveau de l'écriture du scénario de la fiction. Nous avons mis du temps à trouver les moteurs intimes de ce scientifique que je joue, qui l'ont amené à contrer l'emprise des flux audiovisuels. Et une autre des difficultés a été les reports et l'incertitude du climat qui régnait sur les salles de spectacles ces deux dernières années.

Pouvez-vous nous parler de Chloé Giraud ?

C’est une comédienne que j’ai rencontrée lors de ce stage avec  Lionel Gonzalez et Jeanne Candel. Très vite j’ai été touché par son énergie et son immense humanité. J’ai eu envie de l’intégrer à l’équipe d’Akté et de lui proposer de rejoindre le projet POLIS –   un projet créé en 2016 sur la parole publique. Tout seul, je galérais un peu sur le commencement d’ ATTENTION, très vite et naturellement, elle s’est greffée au projet. 

La pièce sera t-elle jouée dans des festivals ou d'autres théâtres ?

Pour l'heure la diffusion de la pièce est en discussion avec diverses structures mais rien n'est encore fixé.

Nous aimerions beaucoup être programmés dans le cadre de la Biennale Némo sur les arts numériques qui a lieu à Paris chaque année.

Travaillez-vous sur d'autres projets ?

La prochaine création de la compagnie est prévue pour la fin 2023. Ce sera une mise en scène par Anne-Sophie d'un texte de Manon Ona Au loin les oiseaux . D'ici là nous allons continuer à faire vivre les spectacles déjà créés.

Pour terminer pourriez-vous nous présenter trois artistes de la région que vous appréciez ?

Je choisirais  trois femmes : Chloé Giraud pour que vous ayez la possibilité d’en savoir plus sur elle qui vient de créer sa compagnie dans la Manche.

Diane Gaignoux avec qui j’ai travaillé sur la Création de Kesta mise en scène par Anne-Sophie Pauchet fin 2020. J’ai découvert le travail de création de vêtements de cette jeune artiste-plasticienne qui est installée au fort de Tourneville.

Sabine Meier, photographe, pour son œil et ses trompe-l'œil.

Entretien réalisé par Grégory Constantin Mars 2022

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