Fraîchement diplômé de l’Esadhar du Havre, Alexandre Le Bourgeois est un jeune artiste travaillant in situ les différents espaces qui l’entourent. A travers sa série « Etudes Solaires » il exprime son intérêt particulier pour la lumière au sein de l’architecture, et partagera son univers au public lors d’une prochaine exposition à Mulhouse. 

Bonjour Alexandre, pour commencer pourriez-vous vous présenter ?

Né en 1994 au Havre, ville où j’ai pour ainsi dire toujours résidé, je suis passé par l’Esadhar du Havre où j’ai obtenu mon DNSEP en Juin 2018 pour ensuite consacrer tout mon temps à ma production.

Comment est né votre intérêt pour l’art ?

Etude solaire #9 : Matérialiser la lumière #4 Peinture aérosol, peinture au rouleau, vernis au pinceau. Bois contreplaqué 15mm 60×60 cm Décembre 2018.

Depuis la primaire j’ai toujours aimé dessiner, peindre, assembler des objets, me poser des questions devant les tableaux… C’est une activité qui a pris de plus en plus de temps dans mon quotidien jusqu’à en faire partie intégrante.

A quel moment avez-vous su que vous vouliez en faire votre métier ?

Avant d’entrer à l’Esadhar, j’ai fait une année à l’Université où je ne me suis pas plu. Une fois entré à l’école d’art, j’ai trouvé ma place et à partir du milieu de la seconde année j’ai pris conscience que je voulais continuer à travailler dans ce domaine.

Etude solaire #1. Installation. Bois contreplaqué et peinture acrylique. Esadhar, Le Havre. 2018.

Quels sont les artistes qui vous ont influencé ?

Ils sont très nombreux ! J’ai toujours des listes d’artistes de référence dans mes ateliers… Cependant pour en citer quelques-uns des plus importants, je dirais François Morellet pour son côté décomplexé bien que très géométrique et rigoureux, Claude Rutault pour ses définitions/méthodes, Olafur Eliasson et James Turrell pour leurs travaux autour de la lumière et de la phénoménologie naturelle, James Casebere pour ses maquettes, Jan Dibbets pour sa série Windows…Aussi des références plus jeunes découvertes récemment comme Hélène Marcoz et Marie Clérel qui ont un lien direct avec la lumière solaire et l’architecture.

Comment définiriez-vous le travail in situ à des personnes qui ne le connaissent pas ?

Le terme in situ signifie simplement « sur place », travailler in situ c’est donc travailler dans et sur un espace donné, comme l’ont fait et le font fait les land-artistes ou les artistes urbains par exemple.

Impacts de pois, Peinture aérosol et pochoir, Cap de la Hève, Le Havre. 2018.

Pourquoi vous être dirigé principalement vers ce type d’art ?

Je préfère travailler in situ quand j’en ai l’occasion parce que j’aime travailler par rapport à un espace pré-existant et particulier (à la différence de l’espace d’exposition standard blanc appelé « white cube ») en tentant d’établir un dialogue entre ma production et l’environnement dans lequel elle vient s’apposer, ce qui ajoute une couche supplémentaire de sens.

Etude solaire #4 : Photosensibilité. Vidéo en boucle, 1.43mn. 2018.

Votre série « Etudes Solaires » est principalement basée sur la lumière du soleil à travers l’architecture. Pourquoi avoir choisi de travailler autour de cette thématique ?

Etude solaire #3 : Tournesol. Vidéo en boucle, 2.52mn. Peinture aérosol. Arques-la-Bataille. 2018.

Ce sujet m’intéresse car c’est un phénomène naturel avec sa propre temporalité auxquels nous sommes tous confrontés mais que nous percevons chacun de façon singulière. Comment matérialiser la lumière et son passage, donc le temps ?

De quelle manière l’architecture havraise a-t-elle influencé votre travail ?

Je pense que cette architecture très particulière m’a influencé sur la géométrie des formes que je peins : par exemple avec Scottish Prototype, exposée dans la vitrine de Lorence Drocourt 120 rue de Paris en 2015, les façades des immeubles Perret se reflétaient sur la vitre et sur mon tartan, les fenêtres s’imbriquaient aux rectangles. Plus tard dans mes peintures abstraites au ruban adhésif on pouvait aussi voir une ville comme Le Havre du dessus, quadrillée et rectiligne. Aujourd’hui je regarde l’architecture en tant que volume support de la lumière et des ombres, oubliant sa fonctionnalité.

Scottish Prototype Installation, ruban adhésif peint sur poliane et ruban de chantier. Vitrine HORS’ SERVICE, Le Havre. 2015

Vous avez récemment peint la façade du service culturel du CROUS. Comment est né ce projet ?

Ce projet est mon plus grand à ce jour. Il est né d’une proposition que j’ai faite à Céline Vion, la directrice du service culturel du Crous Normandie, que j’avais rencontrée à l’occasion d’une exposition que j’avais faite à la Maison de l’Etudiant de Caen en Janvier 2018, sur l’invitation de l’association culturelle Alium. En Novembre elle m’a dit qu’elle investissait ce bâtiment que je suis allé voir, et l’idée m’est venue : pourquoi pas décalquer les ombres formées par les rebords des fenêtres pendant la durée d’ensoleillement ? Dans la nuit j’ai réalisé quelques croquis que je lui ai montré dès le lendemain et elle a tout de suite accepté. Par la suite j’ai proposé une autre intervention pérenne à l’intérieur du bâtiment qui là traitait plutôt de la lumière entrant par les fenêtres, formant des rectangles sur une bibliothèque, une porte, le sol et le mur.
D’autres de mes pièces étaient exposées, il y a un mois de cela ainsi que des travaux de Julie Aubourg et Alexandra Laffite Cavalle. (http://ouest-track.com/podcasts/culture-ouverture-du-service-culturel-du-crous-normandie-2493?fbclid=IwAR02FK6USBOEqJrbLdwNDuq-fpALGRqBf-TuNZIK1azYKYOTw6zoQmvvdj4)

Etude solaire #7 : Fixer le temps #5 Peinture acrylique sur façade. Mars 2019.

*Service culturel du Crous Le Havre, 41 rue Casimir Delavigne

Que vous apporte le fait de faire partie d’un collectif tel que celui des Amarts ?

Murs, sols, plafond Installation. Cloison en plâtre, lumière, peinture aérosol. Friche Danton, Le Havre. 2016

Ce que ça m’a apporté en premier lieu, c’est de rencontrer les acteurs de l’art urbain que je voyais tous les jours dans les rues et de pouvoir mettre un visage dessus. Ensuite c’était de pouvoir montrer mon travail en dehors de l’école d’art, exposer avec d’autres artistes, investir de nouveaux espaces, pouvoir proposer des projets in situ : l’expérience de La friche Danton était géniale, on a pu investir un espace énorme, cela m’a permis de rencontrer et voir travailler des artistes confirmés, aussi de pouvoir découper une cloison puis peindre les projections lumineuses du sol au plafond ! C’était une chance inespérée !

Aujourd’hui après la sortie de l’école, cela me permet de rester dans un bain créatif, prendre part à l’organisation de projets, proposer des réalisations à plusieurs, travailler ensembles, demander conseil… C’est vraiment très enrichissant, une association ressource pour moi car elle aborde l’art urbain sous des formes très variées.

Quel projet rêveriez-vous de réaliser dans vos rêves les plus fous ?

Construire une architecture solaire (je réalise des maquettes dont le but est de pouvoir observer les faisceaux lumineux et leurs déplacements, voir Etude solaire #6) à grande échelle comme le Roden crater de James Turell. Et peindre des immeubles, à l’échelle de la ville !

Etude solaire #6 : Prendre le temps. Vidéo en boucle, 2.30mn. 2018.

Quels sont vos projets à venir ?

J’expose à la biennale de la Jeune création à Mulhouse du 6 au 12 Juin, puis je serais en résidence de création à la Villa Calderon de Louviers pendant quatre mois cet été, ce qui va me permettre d’expérimenter le plexiglas et les structures à échelle humaine entre autres. Ensuite j’investirais l’alvéole 17 du Fort de Tourneville avec Marine Nouvel (https://www.marinenouvel.com/), Flör et Noze (Florian Gravé et Noémie Lanos https://florandnoze.wordpress.com/) sous l’association Le Havre Art Base qui deviendra notre atelier-espace d’exposition où on déploiera beaucoup de nouveaux projets et d’événements !

Pour finir, pourriez-vous nous citer 3 artistes havrais que vous appréciez ?

Kévin Cadinot, Miguel Do Amaral Coutinho, et Roméo Lamauve, pour ne citer qu’eux !

Entretien réalisé par Clémentine Descamps Avril 2019

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