Graffeur depuis plus de 25 ans, Sire est le créateur des « Yellow man » (petite abeilles jaune aux yeux noirs) que vous avez pu croiser dans la région havraise. La ville de Montivillers a demandé à l’artiste de présenter ses toiles au réfectoire de l’Abbaye jusqu’au 1er septembre. Nous avons saisi cette occasion pour le rencontrer et apprendre à mieux le connaître.

Bonjour Sire, peux-tu te présenter stp ?

SIRE! Graffeur de la région havraise depuis 25 ans.

Comment es-tu arrivé au dessin ?

Je dessine depuis que je sais tenir un crayon dans les mains, mais c’est la peinture à la bombe qui a été ma réelle source de motivation.

Quelles ont été tes premières influences ?

Tout d’abord, lorsque j’étais enfant, j’aimais reproduire les dessins animés et les bandes dessinés, puis attiré par les rencontres de personnes qui avaient la même passion pour le dessin.

Je suis surtout fasciné de découvrir un autre support que le papier comme les rares fresques sur les murs havrais dans les années 80, puis celles qui sont arrivées avec le mouvement Hip-Hop grâce à des artistes locaux comme PHYN, JACE, RA CREW au début des années 90.

Aujourd’hui, quels sont les artistes que tu apprécies et qui peuvent t’influencer ?

Il y en a beaucoup mais j’aime le travail de DAVE BARANES ou celui du collectif SOFLES découvert grâce aux réseaux sociaux.

Quels sont les premiers lieux sur lesquels tu as créé ?

J’ai d’abord commencé à dessiner sur les murs au marqueur noir mes premiers tags ainsi que divers personnages, puis la couleur est arrivée avec l’utilisation des bombes de peinture.

Quel a été ton cursus d’études artistiques ?

A la fin du collège, mon prof d’arts plastiques avait convoqué mes parents, il pouvait m’appuyer pour entrer aux Beaux Arts de Lille, mais je ne me sentais pas capable d’aller si loin à l’époque.

Quelques années plus tard avec l’obtention de mon BAC professionnel, j’ai passé le concours pour les Beaux Arts du Havre que j’ai raté !!

A ce moment là, j’ai compris que le dessin ne payerait pas mes factures et qu’il resterait un loisir avant tout. « La rue reste la meilleure école à mes yeux.

A quel moment as-tu trouvé ton style ?

C’est en 94 avec la rencontre d’ETIENNE.D, il faisait parti du cercle très fermé des pionniers du mouvement graffiti havrais. Il m’explique les codes, m’apprend à tagger puis me présente à toute sa bande de potes (RA CREW, 3SP CREW).

Déjà contaminé par la fibre Hip-Hop, j’ai alors basculé avec le travail dans le graffiti, et mon style est arrivé.

Pourquoi avoir choisi Sire comme nom d’artiste ?

Le tag est la base dans ce mouvement et il me fallait un pseudo donc j’ai simplement pris l’anagramme de mon prénom « Eric » donc « cire ». Avec la phonétique, j’avais accès à d’autres lettres comme syre, cyr, sir, seer etc…, et  avec le temps ma préférence a été « SIRE » comme signature.

A quel moment as-tu ressenti une certaine reconnaissance ?

Quand on a commencé à me demander de peindre dans des lieux publics.

Tu as créé les Yellowman. Peux-tu nous en parler ?

En 95, je crée mon premier Yellowman. J’aimais bien la méthode de JACE qui utilisait ses Gouzous pour être reconnu au premier coup d’oeil par le visuel avant la signature. Et étant plus attiré par le dessin que par le travail des lettres, j’ai commencé à chercher un personnage qui sortait de l’ordinaire, et après plusieurs essais, les premières esquisses sont apparues, les couleurs jaune et noire sont en référence au maillot du club de foot de mon quartier d’origine : Les Neiges. Puis avec le temps, ses formes se sont mieux proportionnées, des mains et des antennes sont apparues, quelquefois des ailes d’où « l’abeille ». Aujourd’hui transformé à l’infini, il garde toujours la forme de ses yeux avec le reflet blanc. 

Essaies-tu de passer des messages au travers de tes dessins ?

Non, pas forcément et même rarement, je fais plus dans le divertissement et je laisse les gens libres d’interpréter comme bon leur semble mes dessins.

Comment arrive t-on à exposer dans un lieu comme l’Abbaye de Montivilliers ?

J’ai grandi à Montivilliers, et depuis des années, je peins sur les murs soit pour des projets, soit de ma propre initiative. Donc une petite notoriété s’est construite. En 2016, sur les conseils de mon pote JOLEK, je peins ma première toile et un an plus tard, je fais la démarche pour tenter l’expérience d’une exposition solo. Après avoir déposé un CV artistique et un passage en commission, j’ai la chance d’accéder à ce lieu exceptionnel. Je pense que cela est dû aussi aux mentalités qui changent avec l’arrivée du Street art, le graff s’est démocratisé !!!

 

Quels sont tes projets après ton exposition à Montivilliers ?

Continuer à prendre du plaisir est mon unique souci. Aujourd’hui, je peins en harmonie avec ma vie de famille, j’ai la chance de  ne pas attendre après la vente de mon travail, donc je peins librement ce que je veux quand je le veux (sauf avec la météo) et cela me va bien. Mon exposition est jusqu’au 1er septembre, je veux en profiter et savourer l’instant. Ensuite, selon les opportunités qui se présenteront ou pas, je verrai. Une chose est sûre, je continuerai à peindre en gardant les pieds sur terre car cela reste juste de la peinture. 

 

Ces derniers temps, le Street art est mis en avant dans les galeries et rencontre un vif succès sur les réseaux sociaux. Savez-vous quelles sont les raisons de cet engouement viral ?

Des styles, des techniques, des univers de tous les horizons, plus qu’un phénomène de mode, les codes changent et ils parlent à plus de classes sociales.

Quels sont les 3 artistes de la région havraise que tu vas nous présenter ?

« JOLEK » pour tout le travail qu’il fait pour le mouvement graffiti et sa présence artistique depuis de nombreuses années.

« ASKE » un de mes anciens camarades de graff qui touche à tout (dessin, musique…) et sa production de « FISH » qui est à  découvrir très rapidement.

« RATURE & SCARO » le style et la synchronisation artistiques des deux frères sont juste énormes !!