Le Havre ne manque pas de talents parmi les musiciens. Après le rock, le funk, cette fois c’est du côté du Jazz que nous vous invitons avec la découverte de l’univers de Jérémy Bruger et de Mind Watcher.
Mind Watcher sera en concert le 08 décembre au Magic Mirrors.

Quels étaient tes premiers contacts avec la musique étant jeune ?

Il y a toujours eu de la musique à la maison et chez mes grands-parents. Mon père étant musicien amateur, j’ai appris à mettre beaucoup de vinyles sur la platine. Je suis né en 1983, année de la sortie du clip de Mickael Jackson « Thriller » qui marqua un tournant dans l’histoire et étant très jeune, ce fût pour moi un facteur important dans mon attirance pour la musique.

Pourquoi avoir choisi le piano comme instrument ?

Cela s’est fait assez naturellement. Je crois que je devais pianoter là où j’en avais l’occasion. Tout petit, j’ai réclamé vouloir apprendre à jouer du piano car j’en entendais sur les disques qui passaient à la maison. Cet instrument m’a fasciné avec son élégance, son toucher et sa dimension orchestrale qui le caractérise.

Comment es tu passé de Michael Jackson au Jazz ?

Il y a eu beaucoup d’étapes entre mes premières influences étant très jeune et l’apprentissage du jazz à l’adolescence. Le fait d’avoir été nourri de bonne musique dans mon enfance (Brassens, Queen, Santana, Stevie Wonder, Count Basie…), d’étudier Bach, Chopin, Ravel, Debussy… au Conservatoire  et de jouer un répertoire afro-cubain pour mes premiers concerts dès l’âge de 14 ans, a conditionné ma curiosité pour en apprendre davantage, comprendre les subtilités de l’harmonie et de l’improvisation.

Comment a évolué ton apprentissage ?

J’ai intégré le JUPO* au Havre en 1999 puis le Conservatoire de Caen en 2003 et cela m’a permis d’être au contact de bons professeurs, de rencontrer nombre de musiciens et de travailler différents styles, répertoires. Je me suis immédiatement passionné pour le jazz et l’improvisation depuis mes 16 ans, et ça n’a pas changé.

 

Comment se sont passés tes premiers concerts ?

Très bien ! Je suis sur scène depuis mes 14 ans, dans mes souvenirs je devais avoir le trac de me produire en concert devant un public. Au fur et à mesure et jusqu’à maintenant, à force de multiplier les expériences artistiques, la scène est devenue indispensable dans mon équilibre et vital pour la création.

As-tu fait des rencontres décisives pendant ta carrière ?

Quelques-unes oui, j’ai pu rencontrer les pianistes, Omar Sosa, Bill Carrothers et Pierre Christophe. Avec des univers totalement différents, ils m’ont donner envie d’y croire et d’explorer davantage la musique et le piano. Également, j’ai eu la chance de jouer avec de grands musiciens de renoms : Jon Hendricks, Gilad Atzmon, Baptiste Herbin, Sophie Alour, Baptiste Herbin, Olivier Ker Ourio, Romain Pilon, Luigi Grasso, Ronald Baker, Bastien Stil, Daniel Huck, Michel Pastre…

Comment a évolué ta carrière avant de démarrer ton projet Mind Watcher ?

J’ai enregistré trois disques avec mon trio en compagnie de Raphaël Dever et Mourad Benhammou entre 2012 et 2019. Le dernier fut très bien accueilli par la critique mais malheureusement est sorti en plein covid. Depuis une quinzaine d’années j’ai joué en tant que sideman dans différentes formations et participé à des projets originaux (Bibenduum Orchestra) et même accompagné Fakear pour jouer dans une esthétique électro de 2015 à 2018.

 Comment est né le projet de Mind Watcher ?

Au cours d’une session informelle pendant le 2ème confinement. Au début de l’année 2021, j’ai rencontré le contrebassiste Gabriel Pierre en jouant des standards de jazz dans un local de répétition. Puis, peu de temps après,  ce dernier à organisé une autre session chez lui avec Thomas Gaucher, guitariste, et Malte Arndal, batteur. Tout était fluide et pour moi ce fût un déclic. Je me suis mis à composer quelques morceaux pour ce quartet qui allait devenir Mind Watcher.

Peux-tu nous présenter les membres du groupe ?

Né à Saumur en 1995, Thomas Gaucher est un guitariste et compositeur français. Après ses études au Conservatoire Jacques Thibault à Bordeaux, Thomas déménage à Paris en 2019 pour étudier au CNSM de Paris, où il obtient son DNSPM en 2021. Inspiré par des musiciens tels que Gil Evans, Joe Henderson, Belà Bartok, Jim Hall, Bill Frisell… son univers musical tend à être sans frontière, une conséquence de sa curiosité sans limites.

Il est aussi un accompagnateur demandé et joue dans de nombreuses formatons (Olympic 9net, Kinorama, Stride Monkeys, Tuca…).

Contrebassiste diplômé du Conservatoire de Bordeaux, Gabriel Pierre est également musicien classique. A 31 ans, il a déjà multiplié de nombreuses expériences scéniques et musicales en France et dans plusieurs autres pays notamment aux Etats-Unis et à Cuba.

Actif sur la scène jazz parisienne depuis plusieurs années, il joue dans plusieurs projets (dont celui du batteur Cont Bilong) et se produit régulièrement au Duc des Lombards, le Caveau des oubliettes, le Sunset/Sunside, le Baiser Salé…

Il a joué avec Alain Jean-Marie, Lawrence Leathers, Leon Parker, Lukmil Perez, Gaël Horellou, Benjamin Pett, Tony Tixier… Malte Arndal est un batteur danois originaire de Copenhague, basé à Paris. Né en 1995, il mène déjà une carrière en Europe et s’est produit avec Joe Lovano, Jim McNeely, Ethan Iverson, Scott Hamilton, Samara Joy et Christian Sands. Il a joué dans des clubs et festivals à travers l’Europe et les États-Unis, notamment le Dizzy’s Club Coca Cola, le Jazzhus Montmartre, le Ritmo Budapest Music Festival, le Birdland Jazz Club Hamburg, le Duc Des Lombards.

Quels sont les scènes ou festivals majeurs où l’on aurait pu vous voir jouer ?

Nous avons joué au Sunside à Paris pour le Festival Jazz en Seine le 14 octobre dernier, à l’occasion de la sortie de notre album. Nous avons fait nos premiers concerts il y a un an dans les jazz clubs en France  et nous jouons régulièrement à Paris.

Peux-tu nous parler de l’album ? Pourquoi Pathways ?

• Mind Watcher, observateur de l’esprit. À travers les vibrations et sensations que procure la musique, une introspection donne lieu à un regard sur le monde et soi-même, surtout dans le contexte de ces dernières années et son lot de remises en question, d’interrogations, de craintes et surtout d’espérances. Un temps d’observation pour redéfinir sa place parmi les éléments.

• Pathways, chemins.

Le chemin emprunté est celui que nous choisissons, au gré d’évènements, de rencontres, d’humeurs. L’improvisation en musique et particulièrement dans le jazz, permet d’accomplir un voyage dans l’instant, de dessiner une histoire unique et la partager avec le public.

Vous serez le vendredi 8 décembre au Magic Mirrors, as-tu une relation particulière avec ce lieu ?

J’aime bien jouer dans les Magic Mirrors, et notamment celui du Havre. L’acoustique y est très agréable et l’atmosphère particulière avec sa structure en bois est propice pour y jouer dans différents contextes. J’ai pu jouer avec mon trio Moods et d’autres formations, comme avec l’ensemble des profs de jazz du Conservatoire Arthur Honegger  et aussi pour accompagner du théâtre d’impro.

Que nous préparez vous pour ce concert ?

Au menu nous jouerons le répertoire du disque mais aussi quelques nouveautés. Le fait de jouer régulièrement dans les jazz clubs permet de tester de nouveaux morceaux et ainsi affiner le répertoire. En tout cas j’ai hâte de pouvoir jouer ma nouvelle musique dans ma ville.

Qu’avez-vous de prévu pour 2024 ?

Après la date au Magic Mirrors le 8 décembre, nous serons en tournée en février 2024 dans toute la France : Paris, Rouen, Caen, Cherbourg, Toulouse, Marseille… J’espère faire vivre le plus longtemps possible ce projet et pourquoi pas enregistrer un deuxième disque.

Plus personnellement as-tu d’autres projets actuellement ? 

J’aimerai enregistrer de nouveau en trio, car en tant que pianiste c’est une formule que j’apprécie tout particulièrement et dans laquelle je me sens à l’aise. Je retourne fréquemment dans des phases d’écritures, car la composition est quelque chose d’excitant. Voir l’évolution du processus entre les ébauches d’idées et le rendu sur scène est quelque chose de fort. Sinon, je prévois de voyager aux États-Unis l’an prochain et plus précisément à New York, la Mecque du jazz.

Aurais tu trois artistes à nous présenter ?

À l’échelle locale, je pense à deux artistes havrais, Mascarade et Pierre Lenoir Vacquéro. J’aime beaucoup leur travail et trouve cela très inspirant. Ils ont tous deux leur univers et leur façon de travailler l’espace, les formes et les couleurs. Et ils ont surtout la particularité de mettre en avant la ville du Havre et son architecture dans leurs œuvres  respectives.
Également en lien avec Le Havre, j’ai rencontré une jeune artiste peintre birmane, Chuu Wai, qui était en résidence à l’ESADHaR. Elle a fui son pays et développe dans ses œuvres les thèmes de la liberté, de la féminité. J’apprécie les artistes engagés, et Chuu en est une. Lorsque survient le coup d’État militaire de 2021 dans son pays, elle lance le mouvement Write for Right qui encourage les citoyens à écrire et dessiner. Tracassée par le régime, elle a été contrainte à quitter son pays natal. Son engagement et son œuvre lui ont valu de nombreuses distinctions internationales.
 *JUPO  Jazz Union Porte Océane

Entretien réalisé par Grégory Constantin Octobre 2023

Contribution à la rédaction Fabrice Autret

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